Si le "Principe" (prince) De Curtis, alias Totò, a rencontré dans
le paradis de la bonne humeur d'un autre grand esprit
déconneur comme Frank Zappa, la conversation doit sans
doute viser un " neveu " qui habite encore cette vallée
de larmes, avec l'engagement de porter un souffle
de joie aux chroniques d'ordinaire remplies de
désespoirs, il s'appelle Daniele Sepe.
Le spectacle s'appelle " TotòSketches " et est le plus
formidable hommage théâtral et musical rendu à l'oeuvre
comique du "Principe".
Le curriculum musical de SEPE qui semble un casse-tête : du
folklore au quatuor à cordes, des pistes sonores au jazz.
Comme le "Principe", et comme Totò, il
a en horreur les honorables " violons ", les banalités
hautaines et les bla-bla qui ricanent dans le vide pour
cacher une grosse ignorance de fond.
Le Public s'attendait à quelque chose de spécial, quand
il a vu le quartet à vent placé d'un côté de la scène,
contre-basse et batterie de l'autre côté, au milieu un
écran géant : images comiques déraillantes " vêtues " de
bonne musique.
Le fait est que SEPE invente des
surréalités perfides qui sont à l'avant-garde mais qui après se
dégustent comme les péripéties du "Principe" à commencer par
la mortelle intro! Le sonore, c'est l'orchestre de SEPE,
qui en temps réel (et avec un synchronisme stupéfiant)
dans l'ombre renvoie les rictus, soubresauts, les gifles
et les sons . C'est un caléidoscope, avec une
pointe de tendresse, espacée quand sur l'écran, c'est Totò
lui-même qui dirige "l'Art Ensemble of Soccavo ".
Le "Principe" retrouve nerfs, muscles et intelligence
comique, on a peine à croire que ce qui succède au-delà
de l'écran ne soit pas né dans le même compartiment où
Totò raillait honorablement. Puis les lumières se
rallument, le rêve intelligent de SEPE s'évapore et
sur l'écran une inscription
avertie que, en tout cas, toute limite a une patience.
Guido Festinese. La Republica 6/8/94.
Totò sketches (Autres article)
Théâtre " comploy esoterism " pour un concert
performance, ou plutôt un spectacle d'images et de sons,
de traditions et d'avant-garde que l'on n'hésite pas à
définir comme magique et digne d'être vu plusieurs fois.
Tout construit sur la spontanéité et sur la fulminante
équation yeux/oreilles, "Totò sketches" est, en fait,
une inexorable boite chinoise d'idées géniales et de
clowneries paysannes, une surréalité, mais en même temps
ayant une opération multimédiale, conduite sur le fil du
souvenir et du rêve infantile mais exécuté avec l'esprit
désenchanté et avec les frénésies de notre temps.
Dans l'hommage au "Principe" De Curtis et sa mascarade,
railleuse et dramatique, dans le choix non hasardeux des
morceaux cinématographique remarquables, en bref, ce
n'est pas un tribut au Maître ou à l'exaltation
tout court d'une " Napolitanade " faite de soubresauts,
bouffoneries et autres futilités.